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Demain, j’embarque à bord de l’Invincible Armada, avec mes compagnons d’infortune que je ne connais pas encore.  L’équipage que je rejoins tient la barre ferme et le vent nous portera sur les rivages paisibles de la vie sans aléas.
Nous ferons route vers le levant et le soleil qui se lève, là où l’espoir et la vie se tiennent la main. La traversée ne sera pas sans écueils et nous tirerons des bords parfois carrés. Qu’importe cette traversée maladroite où parfois nous baisserons parfois la garde mais l’équipage sera solidaire et mènera la flotte à bon port .

©️ Paloma GUERAN 

La Greubiche

J’avais six ou sept ans. Maman étant de santé fragile, nous vivions avec un petit personnel à notre service… laveuse , repasseuse  …. Non que nous étions riches mais il fallait bien faire face aux besoins de notre famille nombreuse à cette époque.

Tous les lundis, venait à la maison celle que nous appelions la Greubiche, surnom vraisemblablement sorti de l’imagination fertile d’un de mes frères .

Sa tâche consistait à laver le linge de la maisonnée dans la buanderie adjacente.
Elle y consacrait toute la matinée.

Au déjeuner familial, selon le désir de mon père, elle prenait place à table.

Cette femme avait un don particulier, celui sortir de sa poche un mouchoir parfumé à la violette, parfum qui me soulevait le cœur au milieu de notre déjeuner.

Ma sœur et moi, avions pris l’habitude de prévoir ce moment fatidique et parions a coups de pieds échangés sous la table le moment où il se produirait.

Inévitablement, nos petites jambes d’enfants manquaient leur cible et atteignaient parfois même les jambes de l’intéressée .

La Greubiche regardait mon père et lui signalait notre attitude. Nous devions alors quitter immédiatement la table sans comprendre cette sanction qui nous privait de dessert presque tous les lundis.

Pendant des années, l’odeur de la violette m’a poursuivie et fait fuir.

Aujourd’hui quand je regarde cette timide et délicate fleur me revient en même la présence de la Greubiche à la table familiale et la cruauté de ce jeu innocent de l’enfance.

©️Paloma GUERAN 

Au petit matin, mes pieds sautillent par dessus les premières étoiles de sel et de gel qui ornent le sentier de la dune. La mer comme moi fait silence et respecte ce cadeau d‘un hiver qui approche en silence.
Au retour, je te ferai un collier d’étoiles. Beauté éphémère, effet mer. 

©️ Paloma GUERAN

L’enfance froissée  par le silence s’était assise sur une pierre de lune au bout du chemin. Un rai de lumière était venu la frôler alors elle s’était élancée pour danser et conter sa confiance. Le monde de la nuit applaudit, l’espace s’emplit de notes de joie égrenées en arpèges. Symphonie.

©️ Paloma GUERAN

Ce matin le vent frappe à la porte, la pluie gifle les vitres derrière les brises-bise . Enfiler mes bottes et mon ciré pour marcher dans le vent. 
Regarder la maison d’Eugène dont les volets battants disent l’absence. 
Marcher au Nord Ouest vers la lande et la mer tempétueuse .
Puis rentrer me chauffer au feu de la cheminée pour y sécher les souvenirs de l’été .
Rêverie insulaire.
©️ Paloma GUERAN

Elle feignait 
L’indifférence 
Se drapait 
Dans le silence.

Sous ses mains
Ses yeux 
Se noyaient 
Dans une eau
Cristalline
Qui fuyait
Vers la mer
Qui ourlait 
Son regard.

Les lèvres
Scellées 
Taisaient 
La tristesse.

©️ Paloma GUERAN 

Quelques gouttes ont désaltéré la terre qui relève la tête et contemple éblouie la plage désertée que quelques goélands griffent . 
Le regard s’enfuit vers l’horizon et quelques crabes verts espèrent l’équinoxe qui s’approche à pas lents.

©️ Paloma GUERAN

Sur le sable scintillant, j’ai guetté la première vague qui est venue me caresser le pied et tendrement m’inviter à aller à ta rencontre. Elle et moi chevauchant gaiement sur l’erre du vent avons gagné l’horizon. De ma main je t’ai cueilli et j’ai gardé à mes lèvres le jaune de ton merveilleux sourire.
A l’horizon l’air s’est fait léger et le bonheur transparence. Je suis au delà de l’air sur l’horizontale vertigineuse. 
Ma main s’est teintée d’ocre pour te danser en moi.

©️ Paloma GUERAN 

A la gare de l’oubli, je suis montée dans le train des sans soucis sans armes ni bagages. J’y ai rencontré des compagnons d’horizons lointains au goût de sel et de mer. J’ai pris une poignée de « Forget me not » que j’ai semée sur les rails de l’ailleurs. 
Demain sur la plage de sable fin qui s’échappe de ma main entrouverte , je serai neuve et l’onde me bercera . Je m’assiérai sur la pierre où tu viendras me chercher toi l’aile qui fend l’éther et sur la diagonale du bonheur nous ferons route vers l’horizon nimbé de mystère.

©️ Paloma GUERAN

Ligne infinie, confins ou genèse. Une ligne où mer, ciel se confondent, se mêlent ou s’ignorent. Une ligne comme quête vers tout, rien. Une ligne point d’interrogation qui suspend le temps entre début et fin, humain et divin.

Une ligne sans réponse où le point se fait suspension.

Où l’oiseau s’enfuit à tire-d’aile.

©️ Paloma GUERAN